Les espèces invasives, un sujet qui fait débat

Au sein de la communauté scientifique, les points de vue sont divergents. Certains présentent les espèces exotiques envahissantes comme la troisième cause de l’érosion de la biodiversité mondiale alors que d’autres critique la problématique des espèces invasives. Jacques Tassin (chercheur écologue au CIRAD) nous met en garde et critique la presse généraliste utilisant des métaphores et un champ lexical guerrier, anxiogène, nationaliste[1]. Une étude sociologique[2] a montré que les riverains et gestionnaires évalue de manière bien plus négative le paysage lors de la présence de renouées que les personnes ne la connaissant pas.

Monsieur Guillaume Fried (chargé de projet recherche sur les plantes invasives), quant à lui, essaie de dédiaboliser les espèces invasives sans minimiser les impacts et enjeux. Pour cela, il semble nécessaire de mieux comprendre ces espèces et de peser le pour et le contre. En effet, les études récentes[3] ont montré que parmi les plus de 6000 espèces de la flore de France, 88% sont des espèces indigènes et 12% sont naturalisées (espèces introduites rencontrant les conditions écologiques favorables à son implantation durable et se reproduisant naturellement). Cela peut se traduire par une augmentation de la richesse floristique à l’échelle de la France. Cependant, en regardant à une échelle locale, on peut s’apercevoir dans certains cas d’une diminution de la richesse spécifique[4]. Mais alors s’agit-il d’un enrichissement ou d’une menace pour la biodiversité ? La réponse n’est pas simple puisque ces espèces sont un enrichissement et une menace.
Il est évident d’aborder une réflexion sur la gestion de ces espèces. Est-ce que la gestion est nécessaire ? Quel est le mode de gestion le plus approprié ? Est-ce que l’espèce va se propager ? Représente-t-elle une menace pour la biodiversité ? Il n’y a également pas de réponse simple à ces questions ! Ce qui semble le plus judicieux, c’est de faire de la prévention, de la sensibilisation et des formations sur ces espèces aux grands publics. Il est nécessaire de repenser à la gestion de ces espèces invasives, en proposant des actions à la « carte » hiérarchisées qui devraient tenir en compte du stade d’invasion, de la faisabilité et de la biologie de l’espèce.

[1] J. Tassin et C.A. Kull : Natures Sciences Sociétés 20, 404–414 (2012)

[1] Marylise Cottet, Anne Rivière-Honegger, André Evette, Florence Piola, Soraya Rouifed, et al.. Représentations et pratiques de gestion des renouées asiatiques : intègrent-elles les dynamiques à long terme des écosystèmes ?. 2018, ⟨10.4000/geocarrefour.10451⟩⟨halshs-01972385⟩

[1]  Tison J.-M., De Foucault B. (coords), 2014, FLORA GALLICA – FLORE DE FRANCE , Ed. Biotope (Mèze), 1196p

[1] Fried, Guillaume et al. (2014). Impact of invasive plants in Mediterranean habitats: Disentangling the effects of characteristics of invaders and recipient communities. Biological Invasions. 16. 1639-1658. 10.1007/s10530-013-0597-6.